Température 32° /Hébergement : Paradise Lodge Arbaminch
Nous sommes parties ce matin pour 8h de route, un peu fatiguées ; il faisait si chaud dans la chambre ; même sous ventilateur notre sommeil n'a pas été réparateur. La route, en très mauvais état, nous secouait abondamment. En compensation, elle nous offrait des oiseaux, des singes, des tombes... plein de choses à photographier.
À un moment nous avons bifurqué vers les hauteurs sur une piste presque plus agréable que la route principale. L'air était plus frais. On croisait des villages inattendus, des troupeaux, des gens marchants, enfin rien d'inhabituel. Enfin si. Plus loin, en travers de la route un important groupe d'hommes marchait d'un bon pas. Un mariage ? Un décès ? Un coup de main à un autre fermier ? Nous les avons doublé sans trop les détailler.
Puis, au niveau d'un autre groupe le chauffeur s'arrête. Une discussion animée commence. Pendant ce temps Anne prend une photo d'un groupe d'enfants près d'un tas de pierres. Le chauffeur, l'air grave, dit "pas de photo". Cela nous incite à regarder de plus près les hommes en question... tiens tiens, certains portent des lances avec pointes métalliques au bout. Le chauffeur ouvre la porte passager à l'avant pour faire monter un policier. Nous osons poser la question "que se passe t-il ?" "Des problèmes plus loin" nous réponds t-il , son visage est sérieux. Vigilantes mais, en bonnes européennes à qui rien n'arrive vraiment, nous ne nous inquiétons pas. Nous croisons des groupes d'hommes marchant à vive allure, armés de lances, de machettes, 1 seul d'une carabine. Les troupeaux sont confiés aux enfants. Comme d'habitude, ils s'animent au passage de notre voiture, faisant de grands gestes et réclament à grands cris crayons et autres denrées.
"Que ce passe t'il ?" Redemandons nous à Million.
"La route est coupée devant. Il y a des problèmes ". Il s'arrête à chaque fois qu'il voit des hommes et les interroge. Puis il stoppe à un endroit désigné par notre passager qui descend. Rediscutions. Il décide de rebrousser chemin. "Il existe une autre route ?" "Non". On croise alors un équipage de 3 voitures remplies de touristes, comme nous. S'ensuit une conversation entre le chauffeur de tête et Million. Les touristes des autres voitures sortent se dégourdir les jambes et ne semblent pas se demander quoique se soit alors qu'ils ont croisé les mêmes hommes que nous. Million décide de tenter de passer avec ces autres voitures. Au cours du chemin s’en agglomèrent d’autres. Il faut savoir que dans le pays, il y a une grande bienveillance à l’intention des touristes. Anne lui demande si c'est l'armée qui est de l'autre côté, il sourit et dit que non. Il précise enfin que ce sont des groupes d'ethnies différentes qui se querellent. Cette fois ci nous allons plus loin et atteignons un petit village.
Les chauffeurs, très calme, repartent dans de longues conversations avec les hommes du coin. Les autres touristes sortent se dégourdir les jambes. Les femmes locales entament des discussions avec nous, partagées entre l'envie de réclamer argent, vêtements, chaussures, ... et celle d'échanger amicalement. On se sourit, on se sert la main, on échange nos prénoms. L'ambiance est calme.
Mais nous n'oublions pas que juste avant d'être arrivé au village, nous avons vu monter une colonne de fumée noire un peu plus loin. Nous avons vu la même chose en plein Paris avec les gilets jaunes. Et c'est seulement maintenant que nous effleure l'idée qu'après tout nous ne souhaitons pas particulièrement forcer le blocage ni même attendre que ça se règle. Million appelle alors son patron, notre voyagiste Fanuaille qui lui, parle français. Il lui explique la situation, nous le passe et nous décidons ensemble que c'est mieux de rebrousser chemin. On s'en va par une autre route. On s'arrête au niveau d'un policier sans arme, de ceux qui contrôlent la route. Il est triste de la situation ; des parents à lui font partie de l'autre groupe. Il attend des collègues qui justement arrivent. On reprend la route. On s'arrête encore une fois au niveau d'un bus local dont le chauffeur, après discussion, dit que de toute façon la route est aussi bloquée de l'autre côté. Million, encore une fois, décide de tenter le coup car il n’est pas très inquiet. L'homme se sait responsable de nous et tente de faire au mieux. On essaie bien de lui proposer de repasser par la route de montagne sur laquelle nous étions. Ça ne lui plaît pas. On continue. On ne s'arête plus au niveau des autres voitures. "Ça arrive souvent des problèmes comme ça ?" "Oui, des fois, mais on préfère régler ça entre nous. Si on préviens les autorités ils bloquent tout et tout le monde s'inquiète". On comprend le message ; il ne faut pas s'inquiéter. Ça tombe bien ; on ne s'inquiète pas. Depuis que l'on a pris cette route, des groupes de villageois sont rassemblés en attente de nouvelles. Puis petit à petit autour de nous ce sont les activités courantes qui reprennent. Les troupeaux sur la route, des gens qui marchent et portent, d'autres qui assis à l'ombre se reposent - car il est midi maintenant - nous qui prenons des photos, nos pensées qui vagabondent sur de tout autres sujets. Plus un homme armé sur la route. À si ! La ! un ! Mais pas de blocage. Nous retournons à notre somnolence de touristes trimballées. C'était une simple rixe locale. Incident clos. Nous apprendrons que les autres touristes sont passés vers 15h de l'autre côté, escortés par des rangers. Nous retournons á l‘hôtel de ce matin où nous espérons trouver une chambre. Finalement nous saurons à quoi ressemblent les chambres du bout ; moins belles, plus fraîche, plus loin. Nous décidons d’aller sur le lac pour voir crocodiles et hippopotames, histoire de risquer réellement quelque chose. On a vu mieux, mais c’était quand même agréable.